Le gouvernement veut introduire une nouvelle obligation d’autorisation parentale pour l’inscription sur les réseaux sociaux des moins de 16 ans.
Est-ce réaliste ?
Les géants de la technologie tentent chaque jour de fidéliser une nouvelle clientèle, et une manière de le faire c’est de les séduire dès leur plus jeune âge. Afin de protéger les enfants et les adolescents, Nicole Belloubet, ministre de la Justice, et Mounir Mahjoubi, secrétaire d’État chargé du Numérique, ont annoncé en Conseil des ministres, mercredi, leur volonté d’exiger « le consentement des titulaires de l’autorité parentale » des enfants de moins de 16 ans qui souhaitent s’inscrire sur des réseaux sociaux. Une mesure qui devrait figurer dans le projet de loi relatif à la protection des données personnelles qui transpose le nouveau cadre juridique européen et qui entrera en vigueur en mai prochain.
« Un effet incitatif »
Actuellement, de nombreux enfants s’inscrivent sur les réseaux sociaux avant 13 ans. Alors, repousser cet âge peut-il les protéger davantage? « C’est juste une manière déformée de voir la réalité, au même titre que le filtrage parental, c’est inefficace », tonne Thomas Rohmer, président de l’Observatoire de la Parentalité et de l’Éducation Numérique (Open). Il pointe la débrouillardise des enfants sur ces plateformes. « Ils trouvent toujours des tutoriels pour désactiver les filtres ou contourner les interdictions. Nous savons pertinemment que les enfants ont des comptes sur Snapchat à partir de 11 ans », ajoute-t-il.
Le président de l’Open craint même que cette nouvelle restriction crée un « effet incitatif », « sur le modèle des jeux vidéo interdits aux moins de 18 ans ». « Cela peut donner envie aux plus jeunes d’y aller pour dire qu’ils sont sur les réseaux sociaux des grands », explique-t-il.
Comment protéger efficacement les enfants ?
Les réseaux sociaux sont « des outils de sociabilité pour les enfants », note Thomas Rohmer. Il est donc contre-productif de leur interdire. « Il faut les accompagner », avance le président de l’Open. Lundi, aux États-Unis, Facebook a pris les devants en lançant Messenger Kids, une version de sa messagerie pour les 6-12 ans. La plateforme jure ainsi répondre à un « besoin » des parents, avides de protéger leurs enfants des dangers potentiels de la technologie et d’Internet. Dans cette version, les parents contrôlent par exemple la liste des contacts et il n’y a ni publicité ni achats intégrés.
« Un leurre », selon notre spécialiste. « Le réseau de Mark Zuckerbergest abandonné par tous les enfants et les ados, donc c’est une nouvelle opération pour attirer un public plus jeune ». La solution selon lui, serait de permettre aux parents de « s’emparer de cet enjeu d’éducation ». « La prévention scolaire au collège c’est inefficace car c’est trop tard. Il faut que les parents éduquent les enfants à la notion de l’intimité, du droit à l’image mais aussi qu’ils montrent l’exemple », conclut-il.
Par Amandine Seguin, publié le 14/12 – L’express