Le Défenseur des droits a ouvert une instruction après la saisine de l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique. L’organisation s’inquiète de cette pratique qui fait des clics dans un vide juridique complet.
Les enfants stars de YouTube bientôt privés de déballage de cadeaux, de dégustation de bonbons et autres challenges en « placement de produits » devant leurs milliers d’abonnés internet ?
« L’idée n’est pas d’interdire, c’est d’accompagner et de protéger », fait valoir Thomas Rohmer, président de l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique (Open). Début août, son organisation a saisi le Défenseur des droits sur cette pratique comparée par ses détracteurs à du « travail illicite » d’enfants. Une instruction est ouverte. Inédite, la démarche s’annonce complexe pour le Défenseur des droits appelé à se prononcer sur un phénomène de société qui a évolué plus vite que le droit.
Des revenus conséquents
« Il est urgent que s’étendent aux jeunes youtubeurs les dispositions protectrices des enfants présentes dans le code du travail », insiste la sénatrice de Loire-Atlantique Michelle Meunier. Début juin, l’élue PS, vice-présidente de la commission des Affaires sociales, a interpellé la ministre du Travail Muriel Pénicaud au sujet des enfants utilisés dans les vidéos à portée publicitaire sur internet. « Ces vidéos cumulent des millions de vues et peuvent générer des revenus conséquents aux parents des enfants filmés », alerte la sénatrice. « En dessous d’un certain âge, cette exposition peut avoir des conséquences sur le développement psychologique de l’enfant, sur l’atteinte à sa dignité. » Sa question écrite au gouvernement est à ce jour restée lettre morte.
« Un loisir privé »
« L’activité, telle que nous la connaissons aujourd’hui est un loisir privé », avait tranché à l’automne le ministère du Travail face à la polémique. « Je ne connais pas de loisirs qui génèrent des revenus », objecte Thomas Rohmer. « À raison d’une vidéo par jour, les enfants sont privés de toute activité de loisirs, de vie sociale », souligne l’avocate de l’observatoire Christine Aubague dans une interview à LCI. Fin juillet, la vice-présidente Michèle Créoff du Conseil national de la protection de l’enfance (CNPE) a évoqué un « milieu compliqué à appréhender ». Notamment parce qu’avec le « unboxing » (« déballage des cadeaux » en anglais), les rejetons sont mis en scène par leurs parents. Même si certaines chaînes, très populaires auprès des moins de 10 ans, sont devenues de véritables petites entreprises familiales. Bien loin des films en super-8 souvent flous que l’on repassait à chaque Noël. Entre défi bon enfant et business juteux, difficile parfois de distinguer. D’ailleurs, l’avis du Défenseur des Droits sera purement consultatif.