Comment expliquer que nos jeunes puissent aussi facilement dénicher des contenus X ? Que font vraiment politiques et législateurs pour les protéger ?
Des lois interdisent « le fait soit de fabriquer, de transporter, de diffuser par quelque moyen que ce soit et quel qu’en soit le support, un message à caractère violent ou pornographique ou de nature à porter gravement atteinte à la dignité humaine, soit de faire commerce d’un tel message, est puni de trois ans d’emprisonnement et de 75 000 euros d’amende lorsque ce message est susceptible d’être vu ou perçu par un mineur ». (article 227-24 du code Pénal). Pourtant, la mise en pratique est plus complexe. Il suffit d’entrer une série de mots ou directement le nom d’un site pornographique pour y avoir accès directement.
Thomas Rohmer, Président de l’Observatoire de la Parentalité et de l’Education du Numérique, se bat pour rendre impossible l’accès des mineurs aux contenus X. Il rappelle cette triste réalité dans le documentaire Pornographie : un jeu d’enfant d’Anne-Marie Auvouac : « Les fournisseurs d’accès à Internet ne sont pas tous prêts à bloquer la pornographie car ils en vivent et vendent ces contenus sur leurs canaux ».
Le classement X : la fausse note du gouvernement ?
Le gouvernement peine à faire régner la loi, comme c’est le cas depuis les années 70. Dès l’élection de Valérie Giscard d’Estaing, une vague de films érotiques et pornographiques sort au cinéma. Penchant, au départ, pour une taxation, Jacques Chirac, alors Premier ministre, et son gouvernement, mettent en place le classement X et coupe les aides publiques à ce cinéma, qui devient de moins en moins dense. En 2009, l’ordonnance de 1974 est revue : passage en commission du CNC, taxation à hauteur de 20% des bénéfices… Tout est réfléchi pour freiner l’industrie du film X.
Un système toujours en vigueur en 2019 que la réalisatrice Ovidie (Histoires de sexe(s)) qualifie de « ghettoïsant ». Cette restriction lui a mis des bâtons dans les roues pour la diffusion à grande échelle de son film. « Les courts passages explicites ne sont que des illustrations des propos tenus par les protagonistes. 95% de dialogues, pour 5% de sexe, et non l’inverse. Il ne s’agit en rien d’un film masturbatoire. Nous attendions l’émergence d’un genre nouveau : celui du film traitant ouvertement de la sexualité, affranchi des codes de la pornographie et de son quota d’éjaculations faciales », se justifie la réalisatrice à Libération. En plus de figer un modèle de film érotique et porno, le classement X ne résout pas le problème de ces contenus, trouvables facilement sur Internet.
Internet-tout-puissant ou le porno sans frontières
Les DVD puis l’essor d’Internet, Youtube, Snapchat.. force l’Etat à revoir ses textes. Prenant exemple sur son voisin britannique, la France souhaite mettre en vigueur une série de filtres pour empêcher les mineurs d’accéder aux sites pornos. A l’aide d’un SMS, passeport, permis de conduite voire d’une photo d’identité, l’internaute pourra entrer sur un site pornographique après avoir montré patte blanche. Le hic : l’utilisation des données personnelles qui, selon les sites pornographiques, est totalement respectée, mais également le fait que ce sont eux qui devront s’acquitter du coût des blockchains,
Il existe également des « pass » vendus chez le buraliste, à l’instar d’AgeChecked ou AgeID, qui sont des outils pour vérifier l’âge des utilisateurs en ligne, entre 5 et 9 livres Sterling outre-Manche.
Si l’idée semblait bonne, la pratique n’a pas porté ses fruits car l’Angleterre s’est heurtée à quelques difficultés. En effet, AgeID, l’un des deux portails vendant des pass dans le commerce pour prouver sa majorité… appartient à MindGeek, le groupe qui détient YouPorn !
Contenus pornographiques censurés sur le Net : la Chine précurseur ?
Il est très complexe de tenter de stopper l’invasion d’images et vidéos pornographiques, que l’on peut trouver sur Google Images ou Twitter, en quelques clics, sur un champ aussi vaste que la Toile. En 2013, l’Islande et la Chine ont pour dessein de censurer ces contenus, le premier pour protéger les enfants et les droits des femmes, le second pour remettre son peuple dans le « droit chemin ». Seul l’Empire du Milieu semble avoir relevé ce challenge, mais à première vue seulement puisque les Chinois sont de plus en plus nombreux à contourner le système en se filmant et postant eux-mêmes leurs vidéos pornos, tout en passant par des VPN pour éviter les censeurs.