France 2 consacre une soirée, mercredi, à l’impact de la pornographie sur les jeunes. L’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique alerte les parents et milite pour faire changer la loi.
Thomas Rohmer est président de l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique, qui réclame des mesures pour que les mineurs ne puissent pas se trouver confronter, volontairement ou involontairement, aux images pornographiques sur Internet. Il intervient dans le très bon documentaire Pornographie : un jeu d’enfant réalisé par Anne-Marie Avouac, diffusé mercredi 9 octobre sur France 2.
Quel est l’âge moyen d’accès à la pornographie ?
Il varie selon les d’études. Des études études européennes parlent de 11 ans. Une chose est sure, cet âge diminue et c’est une réalité que 100% des adolescents ont vu ces images entre 11 et 14 ans.
Pourquoi des enfants de plus en plus jeunes y ont-ils accès ?
Il y a dix ans, les choses se sont accélérées. L’accès à la pornographie est passé d’un modèle fermé, réservé aux adultes (dans les sexshops et sur chaines cryptées), à un modèle ouvert avec Internet, complètement gratuit sur les autoroutes de la pornographie, qu’on appelle communément les « tubes ». En parallèle, on équipe les enfants de plus en plus plus jeunes en smartphones et tablettes, ce qui leur donne accès à des contenus dont ils étaient jusque-là préservés.
Dans l’ignorance des parents ?
Il y a une réelle difficulté des parents à se sentir légitimes pour accompagner les enfants dans le numérique. Ils prétendent que leurs enfants savent mieux les utiliser qu’eux. C’est une hérésie mais c’est ce qu’on entend sur le terrain. Les activités qu’ont les enfants sur leur smartphone échappent aux parents. Les adolescents n’ont pas envie de les partager avec eux, ce qui est logique et respectable. Quand les enfants sont plus jeunes, les paretns ne prennent pas le temps ou ne s’intéressent pas à ce qu’ils font avec leur téléphone. Ce téléphone est devenu une sorte de cordon ombilical virtuel pour pallier aux angoisses parentales…
Que préconisez-vous ?
En france, en 2019, c’est très compliqué de parler de sexualité. Le sujet met mal à l’aise, il est complètement tabou. La pornographie est un problème de protection de l’enfance. Il faut protéger les tout petits qui peuvent tomber sur ces images en recherchant un dessin animé en streaming. Nous avons fait des propositions au gouvernement. C’est aussi une question d’éducation : qu’est-ce qui fait qu’un ado cherche ces images ? La réponse est très simple : les adultes, nous tous et toutes, ne répondons pas à leurs questions légitimes. A un âge où ils sont des volcans hormonaux sur pattes, le porno devient leur principale source d’information sur la sexualité.
Que conseillez-vous parents ?
S’ils ne se sentent pas capables de parler de sexualité avec leurs enfants, il faut qu’ils leur apportent des sources d’information fiables. Ce peut être en les mettant en relation avec un éducateur, un membre de la famille, le planing familial… C’est leur rôle de parents. Sinon ces images ne seront jamais déconstruites, ce qui laisse croire aux ados qu’elles sont le reflet de la réalité.
Que peuvent-ils dire à leurs ados ?
Il faut le recontextualiser le porno dans son genre fictionnel. Expliquer que c’est du cinoche à 100%, qu’il n’y a pas besoin d’être un gymnaste pour tomber amoureux et avoir une relation sexuelle,.
Qu’attendez-vous du gouvernement ?
On aimerait que la loi française tienne compte des évolutions du web et que le Code pénal qui interdit de diffuser des contenus pornos vers des enfants soit applicable et appliqué. C’est pour cela que nous avons déposé plainte il y a un an. Ca ne va pas vite, il y a des freins. Tous ceux qui ont l’illusion de croire qu’Internet est un espace de liberté vous considère soit comme un réactionnaire, soit comme voulant empiéter sur la liberté d’Internet. On touche à un sujet intime, difficile à aborder sans vision moralisatrice. Je travaille aussi sur les questions de radicalisation, c’est cent fois plus simple.
Soirée continue « Pornographie : jeunesse en danger » sur France 2. A 21h05 : une fiction Connexion intime. A 22h40, le documentaire Pornographie : un jeu d’enfant. Vers 23 h 30, débat animé par Julain Buger, avec Adrien Taquet, secrétaire d’État à la Protection de l’Enfance, le gynécologue Israël Nisand, le pédopsychiatre Serge Hefez, des jeunes…