Le deepfake est une manifestation bien connue de l’IA aujourd’hui. Il consiste à créer un contenu numérique, principalement à partir d’images, vidéos ou propos d’une personne qui peut être absolument étrangère à la situation.
On a par exemple cru voir un acteur jouer au golf ou un Président des Etats-Unis tenir un discours étonnant. Dans les deux cas, la technologie peut s’avérer efficace et le résultat trompeur. Les dangers sont les fausses nouvelles et l’atteinte à l’image de la personne.
La loi du 21 mai 2024 vient adapter le droit pénal à cette pratique. Il serait erroné de croire que le deepfake ne relevait d’aucune loi jusqu’ici. En effet, le délit de montage prévu à l’art. 226-8 du Code pénal réprime depuis longtemps le fait de rendre public un montage quand la personne concernée ne consent pas à la diffusion du montage et que ce dernier n’est pas évident ou que le trucage n’est pas mentionné. Désormais, la loi prévoit également la publication du contenu généré algorithmiquement. Il est donc important de noter que le simple fait de concevoir le contenu ou le montage n’est pas répréhensible. Autrement dit, faire un deepfake avec son smartphone est autorisé. En revanche, montrer la vidéo sur son smartphone à ses copains est sanctionnable.
En outre, ce délit, puni d’une peine pouvant atteindre 2 ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende, est aggravé lorsque la publication est faite sur internet, notamment sur une plateforme comme Youtube ou un réseau social tel Tik Tok.
La loi vient aussi réprimer de manière spécifique le deepfake sexuel. Récemment, Taylor Swift a vu son image mise en scène dans des vidéos à caractère sexuel devenues virales sur les réseaux. Le législateur ajoute la répression de la publication d’un montage à caractère sexuel et y prévoit que la répression concerne le contenu par algorithme d’une personne non consentante. Outre une répression plus élevée (2 ans d’emprisonnement et 60 000 euros d’amende et 3 ans d’emprisonnement et 45 000 d’amende en cas de publication en ligne), à la différence du montage simple, la mention du montage (contenu généré par l’application X par exemple) ou le fait que le montage est visible n’exclut pas la sanction pénale. Ce dernier délit vient ainsi compléter l’arsenal législatif permettant de lutter contre les atteintes à la vie privée par la diffusion de vidéos présentant un caractère sexuel (sextape) notamment dans le cadre du revenge porn.
Les conseils de l’OPEN :
- Se renseigner sur les lois, c’est connaître ses droits et ses devoirs, même en ligne.
- Valoriser la créativité de vos enfants, c’est bien, mais attention au consentement des
personnes concernées.
Article rédigé par Jérôme Bossan, Maître de conférences en droit privé, enseignant en droit pénal applicable au mineur et membre du comité d’experts de l’OPEN.
Cet article a été réalisé par l’OPEN pour le n°460 de « La voix des Parents » dans le cadre de notre partenariat avec la PEEP. Découvrez les autres rubriques.