On en parle. En partenariat avec l’OPEN, Thomas Rohmer a réalisé avec le psychiatre Serge Tisseron, une série de vidéos pour aider les familles à baliser l’usage des écrans.
En 2008, s’appuyant sur sa pratique clinique, le psychiatre Serge Tisseron, spécialiste du numérique, forgeait à l’adresse des familles la règle du « 3/6/9/12 » : pas d’écran avant 3 ans, pas de jeux vidéo avant 6 ans, pas d’Internet avant 9 ans, pas de réseaux sociaux avant 12 ans. Une injonction facile à retenir, qui reste certes valable mais dont le caractère négatif, reconnaît-il aujourd’hui, donne souvent aux parents « l’impression d’avoir tout faux ».
Aussi, une petite décennie – et quelques ouvrages – plus tard, Serge Tisseron remet-il l’ouvrage sur le métier, sous la forme de 15 brèves vidéos qui seront diffusées à partir de mercredi 15 novembre et au rythme d’une par semaine sur son site et sur celui de l’Open, l’Observatoire de la parentalité et de l’éducation numérique (1).
Dans chacune de ces interviews filmées, le « psy » répond à une question très courante posée par un parent : à partir de quel âge peut-on laisser son enfant jouer sur tablette ? Comment réagir si notre ado est harcelé sur un réseau social ? Que faire si notre fils passe beaucoup de temps enfermé dans sa chambre, devant des jeux vidéo ?
« Donner des astuces, des conseils, des repères »
L’approche, résolument pragmatique, tient compte du vécu quotidien des familles, déjà envahies par les écrans. « Le but est de donner des astuces, des conseils, des repères, et non de diaboliser les outils ou de culpabiliser les parents », indique Thomas Rohmer, le président de l’Open.
Vous voulez jouer avec votre enfant sur votre portable mais ne savez pas quelle application éducative télécharger ? Vous pouvez bien sûr vous fier aux notes attribuées par les sites spécialisés. Mais l’essentiel, soutient Serge Tisseron, c’est de choisir « l’appli » qui vous procurera réellement du plaisir. Car l’enfant « ramène tout à lui ». Et si, à ses côtés, devant l’écran, vous donnez l’impression de vous ennuyer, il aura le sentiment d’être lui-même ennuyeux, prévient le psychiatre.
L’exemple des parents
Au fond, l’essentiel, c’est que le numérique ne détourne pas le parent de sa relation à l’enfant et qu’il n’en vienne pas non plus à restreindre les champs d’apprentissage des plus jeunes. Qu’un adulte éprouve de la fierté en découvrant que son bébé est capable, très tôt, de se saisir d’un téléphone portable et de faire défiler les images avec son doigt, pourquoi pas ? Le problème, néanmoins, prévient Serge Tisseron dans l’une des vidéos, c’est qu’un enfant qui joue régulièrement avec un smartphone risque de négliger une bonne part de sa motricité au profit de ces deux seuls gestes, tenir l’objet et le « frotter ».
« En matière de numérique, bien plus encore que dans d’autres domaines, l’éducation requiert de l’exemplarité », avance Thomas Rohmer. Lui qui pendant douze ans est intervenu dans les écoles pour sensibiliser les élèves aux risques liés au numérique est convaincu aujourd’hui que la prévention passe nécessairement par les parents. « Beaucoup hésitent à se saisir de ces questions parce qu’ils considèrent leur enfant techniquement plus compétent qu’eux. Or ce n’est pas parce qu’on n’a jamais fait soi-même du scooter qu’on se garde de dispenser à sa progéniture des conseils de bon sens lorsqu’on lui offre son premier deux-roues », insiste l’expert.
Denis Peiron – la croix